Attentat de Karachi : nouvelles déclassifications en vue 24 octobre
Elles étaient attendues depuis longtemps, mais curieusement, seuls deux journaux ont informé leurs lecteurs de la décision récente du ministre de l’Intérieur à ce sujet.
Attentat de Karachi. Les souvenirs d’ex-agents de la DST déclassifiés
Les souvenirs d’anciens agents de l’ex-Direction de la surveillance du territoire (DST) vont être déclassifiés dans l’affaire de l’attentat de Karachi.
L’attentat avait tué quinze personnes, dont onze ouvriers français de la Direction des constructions navales. Une des thèses est celle d’une attaque menée en représailles à la décision des autorités françaises d’arrêter le versement de commissions sur des contrats d’armement.
Les parties civiles réclament la levée du secret-défense
Les enquêteurs s’intéressent notamment à un financier saoudien, Ali Ben Moussalem, décédé en 2004. Le juge Marc Trevidic avait demandé dès 2012 une déclassification des informations sur ses liens possibles « avec des organisations terroristes, dont notamment et surtout Al-Qaïda ».
Le nom d’Ali Ben Moussalem avait notamment été évoqué en 2013 devant le juge Trevidic par Gérard Willing, un professionnel du renseignement, auteur d’une note faisant le lien entre l’attentat et cette piste financière. Il avait affirmé avoir transmis ses informations à un de ses contacts à la DST.
En conséquence, les parties civiles réclament depuis des années la levée du secret-défense sur les documents, ainsi que l’audition d’agents de la DST (chargée du renseignement intérieur, devenue DCRI puis DGSI).
Que les témoins répondent directement
Ceux qui avaient été entendus, comme Eric Bellemin-Comte, alors devenu coordinateur national du renseignement à l’Elysée, s’étaient abrités derrière le secret-défense. Et la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) s’était opposée à la levée du secret sur des documents.
Pour contourner cet obstacle, les magistrats instructeurs avaient obtenu en décembre 2014 que les témoins répondent directement à leurs questions via la présidente de la CCSDN, mais celle-ci avait refusé.
Les juges Laurence Le Vert et Trevidic avaient alors envoyé en mars aux agents concernés des questionnaires destinés à être remis directement au ministre de l’Intérieur. « Ainsi, avaient-ils écrit à Bernard Cazeneuve dans une lettre consultée par l’AFP, les personnes concernées n’auront aucun motif d’arguer du secret de la défense nationale pour ne pas répondre aux questions posées et la commission consultative pourra donner l’avis exigé par la loi sur les documents écrits qui lui seront présentés ».
Les questionnaires seront transmis aux magistrats
Dans un avis paru le 2 octobre au JO, la CCSDN s’est refusée à statuer. Mais, selon Me Dosé, dans la foulée, Bernard Cazeneuve a décidé de passer outre cet avis et d’autoriser la déclassification des questionnaires qui doivent être transmis aux magistrats.
« C’est l’aboutissement d’une volonté des magistrats instructeurs, des parties civiles, et aussi d’un ministre de l’Intérieur, de voir enfin versées à un dossier des informations essentielles à la manifestation de la vérité », a commenté Me Marie Dosé.
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Un succès à retardement
P.É. | 08 Oct. 2015, 07h00 | MAJ : 08 Oct. 2015, 05h23
Des demandes de déclassification de documents estampillés « secret défense », le juge Trévidic et ses collègues à l’antiterrorisme en ont lancé beaucoup. « Il y en a d’autres en cours, par exemple sur le Rwanda ou l’affaire de vos confrères de RFI (NDLR : assassinés au Mali en 2013) », indique-t-il.
Dans l’affaire de l’attentat de Karachi (15 morts dont 11 employés français de la Direction des constructions navales le 8 mai 2002), cette bataille, conduite dès 2012 par les juges Trédivic et Le Vert, avec l’avocate de plusieurs des familles de victimes parties civiles, M e Marie Dosé, vient de porter ses fruits. Au terme d’un singulier bras de fer avec la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN), hostile ou « sans avis », tranché in fine dans un sens favorable par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, les questionnaires d’anciens agents de l’ex-DST ( Direction de la surveillance du territoire, aujourd’hui DGSI) devraient être versés au dossier d’instruction. « Il fallait contourner l’absence de documents, qui nous était opposée, en recueillant des informations via les témoignages d’anciens agents », rappelle Me Dosé qui, satisfaite de cette décision de déclassification, espère que leur contenu « permettra d’avancer dans la manifestation de la vérité ».
Dans cette affaire, Trévidic avait ouvert la piste d’un acte de terrorisme d’origine politico-financière, lié à l’arrêt du versement de rétrocommissions dans des contrats d’armements avec le Pakistan et l’Arabie saoudite.