Difficultés techniques du prélèvement à la source : des fuites pour perturber Gérald Darmanin ? 3 septembre
Ceux qui s’opposent clairement à la réforme semblent plutôt redouter l’inconscience totale du ministre ou sa particulière rouerie.
Le prélèvement à la source, une mesure toujours en sursis
Les soucis techniques et les risques politiques font hésiter le gouvernement sur l’opportunité de lancer cette réforme en janvier 2019. Une réunion décisive a lieu mardi à l’Elysée.
LE MONDE | 03.09.2018 à 10h00 • Mis à jour le 03.09.2018 à 10h05 | Par Benoît Floc’h et Audrey Tonnelier
A la veille d’une réunion décisive, mardi 4 septembre à l’Elysée, sur le prélèvement à la source, la confusion s’est encore accentuée ce week-end sur les intentions d’Emmanuel Macron. Cette réforme de la collecte de l’impôt sur le revenu héritée de l’ère Hollande sera-t-elle bien lancée comme prévu en janvier 2019 ? Présente-t-elle un trop fort risque politique ? Est-elle suffisamment prête ? Alors que ces questions agitent l’exécutif et échauffent les oppositions, un article du Parisien, publié samedi 1er septembre, a relancé le débat sur le degré de préparation de Bercy.
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Selon un « document ultra-confidentiel » de la direction générale des finances publiques (DGFIP), les tests menés ont fait apparaître de très nombreuses erreurs, jusqu’à 352 000 en février. Et il n’y a « a priori pas de possibilité de s’en prémunir », indique ce document. Les sources de dysfonctionnements seraient multiples : lors des tests, le système amenait certains contribuables à payer l’impôt d’un homonyme en plus du leur ou de payer plusieurs fois leur propre impôt. Le document évoque un « effet marée noire », selon Le Parisien. Il précise également que les employeurs (entreprises ou organismes publics), auquel échoira dorénavant la tâche de collecter l’impôt sur le revenu, ne sont pas tous prêts. Dimanche, sur BFM-TV, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, ne s’est pas opposé à la mesure mais a réclamé que « toutes les garanties techniques (puissent) être apportées à 100 % par le ministre des comptes publics et son administration ».
Dimanche, la DGFIP a donc assuré que les tests effectués depuis un an « ont permis d’identifier les doublons cités dans la presse et de déterminer comment les traiter pour éviter qu’ils se reproduisent ». Ces expérimentations « ont permis d’améliorer encore le dispositif », conclut le fisc. Samedi matin, Gérald Darmanin, le ministre de l’action et des comptes publics, qui défend bec et ongles la réforme depuis des semaines, avait pourtant reconnu que son « arrêt » était sur la table. Mais la question, avait-il insisté, est politique, pas technique. « Est-ce que, techniquement, on est prêt ? Oui, on est prêt, a-t-il répété sur France Inter. Est-ce que, psychologiquement, les Français sont prêts ? C’est une question à laquelle collectivement nous devons répondre. » « Nous choisirons ensemble politiquement l’avancée ou l’arrêt, puisque le président de la République l’a évoqué, de la réforme », a poursuivi le ministre, qui continuera à défendre cette réforme lors de la réunion de mardi.
« Aucune raison au report »
Mais a-t-il encore des marges de manœuvre ? La décision finale sera prise par l’Elysée et Matignon. Et, au-delà des considérations techniques, les risques politiques semblent peser de plus en plus lourd dans les réflexions de l’exécutif. Le gouvernement craint que la baisse faciale de la paye à partir de janvier 2019 (puisque, avec la réforme, l’impôt est prélevé par l’employeur) ne ralentisse la consommation, ce qui affaiblirait encore la croissance.
La réalité et les effets de ce « choc psychologique », mis en doute par l’entourage de M. Darmanin, semblent avoir provoqué une fracture au sein de l’exécutif. Bercy et Matignon défendraient la réforme tandis que l’Elysée serait plus que réticent. « Emmanuel Macron veut faire savoir qu’il a des doutes et qu’il met lui-même les mains dans le cambouis, décrypte une source gouvernementale. Et, en effet, c’est ce qu’il fait. Après, toutes ces fuites montrent que des gens veulent perturber Gérald Darmanin. Il est vrai que c’est une belle cible. Il conduit une réforme qui touche tous les Français ; il gagne en exposition et en notoriété. »
Au sein de la DGFIP, ces polémiques font aussi grincer des dents une administration sur la brèche depuis des mois pour mettre en œuvre le dispositif. Quand on veut noyer son chien on l’accuse d’avoir la rage, déplorent en substance certains agents du fisc. « Que certaines petites entreprises ne soient pas prêtes, c’est possible. Mais il reste quatre mois !, tempère-t-on en interne. Utiliser une phase de tests destinée à identifier les bugs pour descendre la réforme, cela nous consterne. Il n’y a aucune raison au report, sinon politique, à quelques mois des élections européennes. »
300 millions d’euros dépensés
En principe, le gouvernement peut faire marche arrière jusqu’au dernier moment. Mais, précise une source à Bercy, « le 15 septembre, avec l’envoi des taux d’imposition aux entreprises, on passe techniquement un cliquet. Après, arrêter sera plus complexe ». La question financière n’est pas non plus négligeable. Depuis trois ans, la mise en place de cette réforme a déjà coûté 300 millions d’euros à l’Etat, dont 10 millions en communication – une grande campagne est actuellement en cours. Qu’Emmanuel Macron abandonne le prélèvement à la source, et cet argent aura été dépensé en vain. Surtout, ce serait faire une croix sur plusieurs milliards d’euros d’économies induits par la réforme.
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A compter du printemps 2019, le versement de l’aide personnalisée au logement (APL) ne sera plus décalé dans le temps, comme aujourd’hui. Cela évitera à l’Etat de payer une APL que la situation du bénéficiaire ne justifie plus. Cette mesure, déjà retardée de quelques mois afin d’éviter tout couac technique, ne sera possible qu’avec le prélèvement à la source. L’abandon de la réforme représenterait un milliard d’euros d’économies en moins pour l’Etat.
Par ailleurs, grâce à ce changement de collecte, le gouvernement espère améliorer encore le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu : actuellement de 98 %, il pourrait dépasser les 99 %. Soit 700 millions d’euros de plus dans les caisses de l’Etat. En juin, la Cour des comptes s’était montrée plus évasive : « Au total, les incertitudes sur le rendement du prélèvement à la source en 2019 pourraient s’élever à 2 milliards d’euros environ, soit 0,1 point de PIB », mais… à la hausse comme à la baisse, estimaient les magistrats financiers.
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Prélèvement à la source : comment ça fonctionne et combien vous paierez
S’il est bien mis en œuvre le 1er janvier, le prélèvement aura un impact sur la fiche de paie dès 2019. Cela ne signifie pas pour autant qu’il y aura une « année blanche » pour le contribuable.
LE MONDE | 30.08.2018 à 19h10 • Mis à jour le 31.08.2018 à 12h47 | Par Alexandre Pouchard, Samuel Laurent et Mathilde Damgé
L’application du prélèvement à la source a été repoussée au 1er janvier 2019, mais le sujet sème la zizanie au sein du gouvernement et de l’administration fiscale. Emmanuel Macron a déclaré, jeudi 30 août, qu’il attendait des « réponses précises à toutes les questions qui se posent encore avant de donner une directive finale ». Un peu plus tôt, le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, avait confirmé l’application de la réforme au 1er janvier 2019, suivi par une communication des finances publiques.
Si elle est bien appliquée en janvier 2019, la réforme aura un impact dès cette année en termes de déclaration. Quant aux revenus 2018, redevables en 2019 en théorie et « annulés » avec la mise en place de cette disposition, il s’agira d’une « année blanche »… mais pas pour le contribuable. Explications.
Comment fonctionne le prélèvement de l’impôt à la source ?
Serpent de mer de la fiscalité, promesse de campagne de François Hollande en 2012, le prélèvement à la source consiste à retenir l’impôt directement sur le salaire du contribuable, plutôt que de le laisser percevoir son salaire, déclarer ses revenus et ensuite payer l’impôt.
Pour le contribuable, le salaire est ainsi moins élevé chaque mois, mais il n’y a plus d’argent à sortir spécifiquement pour les impôts une à trois fois par an – ou de mensualisation sur dix mois, comme le font déjà 60 % des contribuables.
Pour ceux qui ne souhaitent pas que leur employeur connaisse l’ensemble de leurs revenus ou pour ceux qui ne veulent pas tenir compte des revenus du conjoint (ou du partenaire de pacs), il va falloir opter pour un taux « non personnalisé » dans le premier cas ou pour un taux « individualisé » dans le deuxième. Ces options doivent être exercées avant la fin de l’année 2018.
Pourquoi vous payerez tout de même
Tous les assujettis à l’impôt sur le revenu s’acquitteront, en 2018 de leur impôt… 2017. Et l’année suivante, en 2019, si le principe du prélèvement à la source est en place, nous paierons l’impôt sur le revenu de… 2019.
Pour le contribuable, le fait de ne pas être imposé sur ses revenus 2018 ne changera donc pas grand-chose : il paiera, cette année-là, ses impôts sur ses revenus 2017. Et l’année suivante, si le prélèvement à la source démarre, il paiera également, mais pour ses revenus de l’année en cours.
En pratique, la mise en place du nouveau système se fera en deux temps :
- le taux du prélèvement appliqué entre janvier et août 2019 sera calculé à partir de la déclaration de revenus 2017 (à remplir en mai-juin 2018) ;
- il sera ensuite « rafraîchi » au vu de la déclaration de revenus de 2018 (au printemps 2019) pour s’appliquer aux prélèvements opérés entre septembre 2019 et août 2020.
Dès l’été 2019, en fonction des revenus déclarés au printemps 2019, les contribuables devraient récupérer le trop-perçu des sommes versées les sept premiers mois de l’année ; ils devront en revanche s’acquitter d’un reliquat si elles ne sont pas suffisantes.
Attention, jusqu’ici, les crédits et réductions d’impôt (emploi à domicile, aide à la personne, etc.) étaient intégrés aux tiers ou aux mensualités, les faisant baisser d’autant. A partir de 2019, ce ne sera plus possible de les étaler : l’avantage fiscal sera remboursé en une seule fois au contribuable, en septembre de l’année suivante (sauf pour les ménages les plus modestes qui auront un acompte plus tôt).
Votre salaire mensuel net : euros
Montant de votre impôt acquitté en 2017 : euros
Payez-vous cet impôt
seul(e) ou avec votre conjoint(e) ?
Une personne seule = une part, deux adultes = deux parts, une demi-part par enfant jusqu’au 3e, qui – lui – vaut une part ; le détail sur service-public.fr.
Salaire mensuel estimé après prélèvement : euros
Dans ce scénario, il n’y aurait plus de règlement massif d’impôt à l’automne (ou de mensualisation sur dix mois comme c’est le cas actuellement).
Le « cadeau » sera… à votre mort
Même si tout le monde ne s’en rendra pas compte, on aura quand même une « année blanche » puisque les revenus 2018 ne seront pas imposés. Ceux qui le verront concrètement sont les retraités qui vont d’emblée être imposés sur leur retraite, et non pas sur leur dernière année de salaire, généralement plus haute.
Et les héritiers. Jusqu’ici, le fisc réclamait les impôts sur le revenu d’une personne décédée dans l’année, puisqu’il s’agissait de ses revenus de l’année précédente. Avec le système de prélèvement à la source, plus d’impôt sur le revenu des morts. Un beau cadeau aux héritiers de milieux favorisés.
Pas d’année blanche, en revanche, pour les revenus « exceptionnels » touchés en 2018 : les plus-values sur des ventes immobilières, les revenus et plus-values sur des produits financiers (actions, obligations, etc.) seront bien soumis à l’impôt correspondant en septembre 2019.
Combien cela coûtera-t-il à l’Etat ?
Si, pour les contribuables, l’année « blanche » ne change pas grand-chose, pour l’Etat, en revanche, il s’agira bien d’une année sans recettes fiscales issues de l’impôt sur le revenu. Mais le manque à gagner serait, lui, étalé dans le temps.
En 2017, le produit de l’impôt sur le revenu était supérieur à 73 milliards d’euros. Certes (deux fois) moins que la TVA, mais (deux fois) plus que l’impôt sur les sociétés. Cette somme « manquera » donc – comptablement – en 2019, même si l’Etat pourra alors compter sur les rentrées fiscales de l’année en cours. A plus long terme, l’Inspection générale des finances a estimé que le bilan entre les bénéfices attendus de la réforme pour les contribuables et les charges anticipées dans sa mise en œuvre pour l’administration fiscale et les « collecteurs à la source » serait positif.
https://www.lopinion.fr/edition/politique/prelevement-a-source-il-est-encore-temps-d-arreter-155797
Prélèvement à la source: il est encore temps d’arrêter
05 Juillet 2018 à 19h41
Il faut soit un culot d’acier, soit une inconscience totale pour prétendre, comme l’a fait Gérald Darmanin, que le report d’un an du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu pour les salariés de particuliers serait « une mesure de simplification ». A qui le ministre des Comptes publics espère-t-il faire admettre que ne pas payer d’impôt une année pour en payer deux fois plus l’année suivante est plus simple ? Que, pour des petits revenus comme en ont la plupart des employés de particuliers, gérer de tels à-coups dans son budget est plus facile ? Comment peut-il présenter comme « une simplification » de faire payer, en 2020 à deux-cent cinquante mille contribuables, deux années d’imposition sous deux régimes de prélèvement différents ? Et que dire des salariés qui partagent leur temps entre particuliers et entreprises ?
L’entêtement du gouvernement sur le prélèvement à la source est incompréhensible. Exaspération des employeurs, rupture de la confidentialité des revenus des salariés, complexité du choix de son taux d’imposition, gestion impossible des crédits d’impôts, incertitudes sur les pertes en ligne, risque de perception négative de son pouvoir d’achat, et désormais application différée dans le temps pour certains salariés, les inconvénients s’accumulent dangereusement.
L’origine du projet, il y a des années, était entièrement politique : l’objectif à demi-avoué de la gauche était en effet de permettre un jour la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG. Et d’alléger à terme la CSG pour les petits salaires en l’augmentant pour les moyens et les gros revenus. Un rêve de taxolâtre que l’administration s’est empressée de faire sien, pour le complexifier à l’envi. Mais il est encore temps : le politique doit reprendre la main et ranger ce projet inutile dans les placards de Bercy, rayon projets fous de la bureaucratie.
Prélèvement à la source : une mesure complexe pour un impôt mineur$
Présenté comme une mesure de simplification, le PAS s’avère bien plus épineux que prévu à mettre en place.
Par Nicolas Marques.
Un article de l’Institut économique Molinari
Véritable serpent de mer, le prélèvement à la source a été appliqué en France de 1940 à 1948 avant d’être abandonné en raison, notamment, de sa complexité. Près de 20 ans plus tard, Michel Debré avait lancé une initiative en faveur de sa réintroduction en 1966. Elle a été abandonnée suite à l’hostilité des organisations syndicales à l’égard de cette mesure qui aurait réduit les salaires nets. Valery Giscard d’Estaing a été tenté lui aussi par la démarche, en 1973.
À nouveau, le gouvernement recula de peur que le prélèvement à la source n’entraîne des revendications généralisées de la part de salariés qui auraient pu considérer, à la lecture de leur feuille de paie, que leur pouvoir d’achat était amputé. Plus proche de nous, Thierry Breton avait travaillé sur la question en 2007, tout comme Jean-Marc Ayrault en 2013, avant que Manuel Valls remette le sujet en selle en 2015.
Les employeurs comme tiers-payeurs
Les employeurs seront chargés de prélever à la source l’impôt sur le revenu à compter du 1er janvier 2019. Cela renforcera leur rôle de tiers-payeurs. En plus de collecter les charges sociales, la CSG-CRDS et une multitude de cotisations, ils collecteront l’impôt sur le revenu.
Dans les faits, ils devront déduire des paies un taux d’imposition communiqué par les pouvoirs publics, basé sur la précédente déclaration de revenu. En effet, les logiciels de paie n’intègrent pas la totalité des informations nécessaires au calcul de l’impôt sur le revenu, loin de là. Conçus pour des calculs de charges sociales, ils ignorent des spécificités comme la composition des ménages, les charges déductibles ou les réductions et crédits d’impôt. Conséquence : les déclarations d’impôts resteront nécessaires, et il faudra mettre en place des aménagements pour les contribuables ayant trop ou pas assez payé d’impôt sur le revenu.
Un des éléments surprenants dans la gestion de ce dossier reste l’absence d’étude d’impact sérieuse en amont de la prise de décision.
Ce choix politique semble avoir été pris sans prendre en considération les précédentes analyses chiffrées. Pourtant, en 2012, le conseil des prélèvements obligatoires estimait que cette mesure coûterait aux entreprises entre 1,3 et 3,5 % des sommes collectées, soit une facture de 700 millions € à 2 milliards € par an. Le conseil estimait que les économies seraient minimes pour l’administration fiscale : de l’ordre de 200 équivalents temps plein, soit environ 12 millions € par an. Mais ce chiffrage ne tenait pas compte de toute une série de surcoûts : les administrations devront notamment contrôler l’activité des tiers-payeurs et gérer les régularisations à faire pour les ménages ayant trop ou pas assez payé.
Gouffres financiers
L’expérience montre que toute une série de projets récents, censés générer des économies se sont avérés des gouffres financiers pour le contribuable. On se souvient que depuis 2012, la comptabilité de l’État a basculé dans « Chorus », un logiciel qui a coûté 500 millions de plus que prévu. L’année suivante, le ministre de la Défense décidait d’abandonner à terme le logiciel de paie « Louvois », après 460 millions de dérapages.
Toujours en 2013, la Cour des comptes estimait que le Dossier médical personnel (DMP) avait conduit à dépenser un demi-milliard en pure perte. En 2014, une réunion interministérielle entérinait l’abandon du projet de refonte du circuit de paie des agents de l’État.
Ce programme, dit ONP, visait à rationaliser la gestion de la paie de 2,7 millions d’agents publics, avec à la clef une facture de 346 M€ pour le contribuable. La mise en œuvre du prélèvement à la source, déjà reportée de 2018 à 2019, puis de 2019 à 2020 pour les salariés de particuliers, présente elle-aussi des risques significatifs.
Or, les gains attendus sont bien faibles. Le prélèvement à la source est déjà majoritaire depuis des années en France, en raison de l’importance des charges sociales et de la CSG et CRDS. L’impôt sur le revenu ne représente que 3,1 % du PIB et moins de 8 % des prélèvements obligatoires. Son traitement, qui ne concerne que 42,8 % des foyers fiscaux, est déjà largement « optimisé ». Les déclarations sont déjà préremplies, entre 60 et 70 % des contribuables sont déjà mensualisés. Le taux de recouvrement est de l’ordre de 98 %, quasiment autant que pour les charges sociales…
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https://www.contribuables.org/2018/08/non-au-prelevement-a-la-source-de-limpot-sur-le-revenu/
Non au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu
- Le prélèvement de l’impôt à la source nie le consentement à l’impôt et va à l’encontre de l’article XIV de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.
- Les contribuables ne seront plus en mesure d’évaluer la charge de leur impôt. Un exemple, qu’il ne faut pas oublier : la CSG des salariés, prélevée à la source, a été multipliée par 7 en 7 ans dans les années 1990, sans que beaucoup de Français s’en rendent compte.
- Les entreprises, les artisans et commerçants employeurs seront transformés en percepteurs-bénévoles de l’État. Ce n’est ni leur rôle, ni de leur compétence. Le PLFR prévoit des mesures d’accompagnement qui ne sont qu’un aveu de la réelle complexité du dispositif et du temps que devront y consacrer les entreprises.
- Les entrepreneurs n’ont pas les moyens financiers de cette réforme. En 2012, le Conseil des prélèvements obligatoires (qui dépend de la Cour des comptes) a estimé qu’une telle mesure coûterait aux entreprises entre 1,3% et 3,5% des sommes collectées, soit une facture pouvant dépasser les 2 milliards d’euros par an. A minima, l’exposé des motifs prévoie un coût initial de 310 à 420 millions d’euros, et un coût annuel de 60 à 70 millions d’euros.
- L’entreprise devra justifier du salaire net amoindri auprès de ces salariés, y compris des augmentations d’impôts dont elle n’est pas responsable.
- Le prélèvement à la source complique inutilement l’impôt sur le revenu et ne signifie pas la fin du système déclaratif des revenus. Comme c’est le cas aujourd’hui, les contribuables devront continuer à déclarer leurs revenus une fois par an. Et le coût de la collecte de l’impôt ne diminuera pas puisqu’il faudra toujours des agents-contrôleurs. Par ailleurs, l’acompte sur lequel est basé le prélèvement à la source impliquera nécessairement des régularisations liées à l’absence de prise en compte des réductions ou crédits d’impôt et au fait que le taux choisi reste lié aux revenus des années N-1 et N-2.
- Les employeurs pourront avoir accès, en connaissant le taux d’imposition et par recoupement des données, à des informations personnelles sur leurs salariés, ce qui risque d’introduire une nouvelle forme de discrimination salariale.
- Le prélèvement de l’impôt à la source est difficilement compatible avec les demandes de remise gracieuse aux services du fisc, (200 000 en 2015). Cette réforme anti-sociale mettra des centaines de milliers de Français dans une situation financière précaire.
- Le prélèvement à la source induit la disparition du foyer fiscal au profit d’une individualisation totale de l’impôt, au détriment de nombreuses familles.
- Avec le prélèvement à la source, les gouvernants s’offrent un outil qui va leur faciliter les augmentations d’impôt. Alors que la mensualisation de l’impôt permet déjà d’échelonner dans le temps le paiement de l’impôt sur le revenu et que le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu est excellent : 98,5%. Le dispositif prévoit un taux de prélèvement basé sur les revenus des années N-1 et N-2. Ce n’est donc clairement pas la notion de contemporanéité qui fonde la mesure. D’autant que si le prélèvement à la source prévoit que le changement de taux peut être immédiat en cas d’événement le justifiant (chômage, naissance…), c’est déjà le cas aujourd’hui où les acomptes peuvent être diminués si le contribuable sait que l’impôt final sera plus faible. Enfin, l’argument consistant à dire que payer son impôt tout de suite facilite la gestion de sa trésorerie est pour le moins spécieux puisque le régime actuel consiste à payer son impôt plus tard. Or, n’importe quel trésorier, gestionnaire ou personne de bon sens pourra vous dire qu’à montant identique, l’avantage de trésorerie consiste à payer plus tard et non à payer plus tôt…
Le seul bénéficiaire de la mesure est donc bien l’État qui sera payé plus tôt. La preuve en est que pour les revenus des travailleurs indépendants et pour les revenus fonciers, il ne s’agira pas d’un prélèvement mais bien d’un acompte.
Signez notre pétition contre l’instauration du prélèvement à la source
Plutôt que l’instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, Contribuables Associés préconise l’automatisation de l’acompte mensuel.
Pour aller plus loin