Féminicides en hausse en 2019, les plaintes des futures victimes toujours vaines 10 avril
Même quand elles y mettent de la bonne volonté, ce qui reste un phénomène encore beaucoup trop rare, les forces de l’ordre et autorités judiciaires ne parviennent toujours pas à appréhender le degré de dangerosité de ces hommes haïsseurs de femmes.
C’est ainsi que s’est produit le quarante-deuxième féminicide de l’année 2019 en France.
Je rappelle à cette occasion que dans ce pays il existe aussi des femmes qui ne survivent qu’en restant constamment barricadées chez elles pour éviter les agressions violentes ou tentatives d’assassinat de leurs harceleurs.
C’est mon cas, et c’est un cauchemar de tous les instants, de nuit comme de jour.
Une fois n’est pas coutume, je vais vous raconter le cauchemar qui m’a réveillée ce matin – parce que quand je parviens à dormir la nuit, je suis toujours réveillée par un cauchemar, c’est automatique.
Est donc revenu me hanter cette nuit un de mes deux harceleurs des années 1990 qui voulaient m’épouser. Non pas parce qu’ils auraient pu m’apprécier ou être amoureux de moi, ni comme aboutissement d’une liaison que nous aurions eue, puisqu’il n’y en avait pas, mais parce qu’ils voulaient à tout prix mettre la main sur mon héritage supposé, une fortune d’au moins dix millions de francs dont le complice proxénète de la criminelle Josette Brenterch du NPA de Brest qui à l’époque organisait tous les harcèlements dont j’étais victime leur garantissait l’existence. Adhérant à 100% à tous les délires et inventions calomnieuses de cet individu à mon encontre, ils me haïssaient tous les deux au moins autant que lui et ont projeté l’un après l’autre, toujours à son instigation, de m’épouser pour s’approprier toute cette fortune qui en réalité n’a jamais existé et dont ils estimaient intolérable qu’elle puisse se trouver entre les mains d’une femme et non entre les leurs, car eux auraient su quoi en faire, n’est-ce pas, ils ne manquaient pas d’idées pour faire fructifier tout cet argent… Leur plan à l’un comme à l’autre était de se débarrasser de moi très rapidement après le mariage ou la signature des documents qui leur auraient assuré tout le bénéfice de mon héritage pour pouvoir alors vivre exactement comme ils l’avaient toujours voulu, bien évidemment sans moi, ma personne ne les ayant jamais intéressés, ni l’un ni l’autre, ce qui était d’ailleurs réciproque, ils me faisaient horreur.
Cette nuit, il avait réussi à m’enlever pour me contraindre à signer l’acte de mariage, m’avait ensuite relâchée et ne donnait plus signe de vie depuis. Etant sans aucune nouvelle depuis quelques jours, je n’en étais pas forcément mécontente, car moins j’ai de relations avec ce genre d’individus et mieux je me porte. Cependant, la détente ou l’apaisement qui en résultait tendait à s’estomper pour laisser de nouveau la place à l’angoisse, sachant qu’avec l’acte de mariage j’avais en fait signé mon arrêt de mort et devais désormais m’attendre à tout instant à l’attaque fatale. Sur ce, je rencontre des gens censés pouvoir m’aider de part leurs fonctions, mais qui ne comprennent vraiment rien à ce que je leur raconte, et restent me regarder l’air totalement incrédules, faisant encore augmenter mon angoisse… jusqu’à me réveiller…
Voilà, en fait, de ces assassins ou de ceux qui les laissent faire, je ne sais lesquels me font le plus cauchemarder et j’ai tendance à dire que ce sont les seconds, car ce sont bien eux qui m’ont toujours le plus angoissée.
Dalila, 51 ans, tuée par son mari dans le Var malgré l’intervention des gendarmes
Ce drame est le quarante-deuxième féminicide depuis le début de l’année 2019. Le mari doit être présenté mercredi à un juge d’instruction.
Par Luc Leroux et Lorraine de Foucher Publié aujourd’hui à 09h48, mis à jour à 11h25
Temps de Lecture 3 min.
Dalila allait avoir 51 ans. D’une première union, elle avait eu trois enfants, deux grands âgés de 27 et 20 ans et une fille de 13 ans. Elle a été tuée, samedi soir 6 avril, alors que les gendarmes venaient de quitter le domicile conjugal, à Vidauban (Var), à une vingtaine de kilomètres de Draguignan. Soupçonné d’être l’auteur de ce meurtre, son mari, 51 ans, un infirmier libéral exerçant à Cogolin, a été placé en garde à vue lundi. Il devait être présenté mercredi à un juge d’instruction en vue de sa mise en examen pour assassinat.
Cette mort aurait-elle pu être évitée ? Appelés samedi en fin de journée, des gendarmes de la brigade territoriale des Arcs se sont rendus au domicile du couple où le mari menaçait son épouse avec un couteau. A leur arrivée, les militaires ont trouvé cette femme chez un voisin, où elle s’était réfugiée. Son mari avait quitté les lieux.
Restés sur place une heure, les gendarmes ont invité Dalila à se mettre en sécurité chez des proches. « Je regroupe mes affaires et je m’en vais », leur assure-t-elle alors, tandis que les gendarmes remontent dans leur véhicule. A 21 heures, ils la rappellent pour prendre des nouvelles, le mari est revenu : « Il est là, il a une arme », dit-elle. Dix minutes plus tard, les militaires constatent son décès, tuée par arme à feu au volant de son véhicule devant le domicile familial.
Violences psychologiques
« Les premiers éléments de l’enquête permettent de dire qu’il est retourné chercher une arme de poing après être venu, une première fois, menacer son épouse », indique au Monde Patrice Camberou, procureur de la République de Draguignan. Le magistrat a ouvert une enquête pour assassinat car « cet élément signe la préméditation ».
Le couple vivait ensemble depuis février 2017 et s’était marié en septembre de la même année. Les gendarmes étaient déjà intervenus dans le passé pour « des différends de voisinage » et des violences conjugales. Fin mars, le mari s’étant montré une nouvelle fois brutal, il avait été placé en garde à vue et déféré devant le parquet de Draguignan. Il devait être jugé le 12 août par le tribunal correctionnel.
Même si, ce jour-là, Dalila n’avait subi que des blessures légères, les violences exercées étaient importantes sur le plan psychologique, selon le procureur. Dans l’attente du procès, l’homme ne pouvait plus entrer en contact avec son épouse. Mais son contrôle judiciaire lui permettait de se rendre au domicile familial pour des raisons professionnelles : accès au matériel, à son ordinateur…
Samedi soir, l’homme avait pris soin de se débarrasser de son téléphone pour éviter toute géolocalisation et en avait acquis un nouveau. Il a finalement été interpellé lundi soir. A Vidauban, un gendarme rentrant chez lui l’a aperçu au volant de son véhicule. Dans sa fuite, il a foncé sur un véhicule de gendarmerie, blessant légèrement un militaire. Cette course-poursuite devrait lui valoir, en outre, une mise en examen pour violences volontaires sur personnes dépositaires de l’autorité publique.
Points de bascule
Le juge d’instruction aura à vérifier quand l’arme, un pistolet automatique de calibre 9 mm, a été acquise. Mais l’instruction portera pour une grande part sur la personnalité de cet homme déjà condamné en 2014 à huit mois de prison avec sursis pour des violences exercées sur une précédente compagne.
La mort de Dalila pose aussi la question de la prise en charge, par les forces de police ou de gendarmerie, des femmes menacées. En effet, ces moments de tension extrême, où elles sont appelées, sont des points de bascule où les victimes doivent être protégées jusqu’à leur mise à l’abri. Pourquoi Dalila n’a-t-elle pas été accompagnée par les gendarmes pour se rendre dans sa famille, alors que son mari était introuvable et armé ?
Selon le comptage officieux du groupe Facebook « Féminicides par compagnons ou ex » réalisé par des militantes féministes à l’aide de faits répertoriés dans la presse locale, le meurtre de Dalila serait déjà le quarante-deuxième de 2019.
A titre de comparaison, trente-deux homicides conjugaux avaient été commis à la même période de l’année 2018. On savait jusque-là qu’une femme mourait tous les trois jours sous les coups de son conjoint. C’est désormais tous les deux jours.
En France, le nombre des féminicides ne fléchit pas
Infographie. Alors que deux marches blanches sont organisées en Corse ce week-end en hommage à une jeune femme tuée par son ex-conjoint, nous publions les principaux chiffres sur les féminicides en France et en Europe.
Par Solène Cordier, Mathilde Costil et Romain Imbach Publié le 09 mars 2019 à 07h29
Féminicides : des meurtres dans toute la France et majoritairement à domicile
Depuis plus de deux ans, «Libération» recense les féminicides survenus en France. L’analyse de ces données révèle notamment que ces meurtres conjugaux sont très majoritairement commis au domicile de la victime, au moment d’une séparation.
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Féminicides : des meurtres dans toute la France et majoritairement à domicile
Depuis le 1er janvier, elles sont au moins 21. Vingt-et-une femmes à avoir été tuées par leur conjoint, mari ou ex en l’espace de 67 jours à peine, selon le décompte effectué par Libération. Chaque mois, depuis janvier 2017, sont recensées les victimes de meurtres conjugaux, sur la base des articles parus dans la presse nationale et régionale. Cette litanie funèbre est incomplète : la banalisation des féminicides, trop souvent relégués à la rubrique faits divers ou transformés injustement en «drames de la séparation» et autres «crimes passionnels», entrave sans doute la pleine compréhension des mécanismes sociétaux à l’œuvre (1). Mais ce décompte permet au moins de rendre hommage aux 239 victimes répertoriées depuis le 1er janvier 2017. De redonner leurs prénoms, leur profession, leur lieu de vie. Et en creux, d’essayer d’appréhender ce qui, peut-être, les lie.
Quels liens entre Monica, employée dans un centre d’appels de 29 ans, tuée à coups de couteau par son conjoint le samedi 5 janvier après une soirée à jouer aux cartes dans leur appartement toulousain, alors que leur fille de 6 ans dormait dans sa chambre, et Pascale, 56 ans, abattue par Robert, dans leur petite maison des Yvelines ? L’analyse des données recueillies depuis janvier 2017 permet d’abord de constater que dans l’immense majorité des cas (76,6%), les victimes sont tuées chez elles ou au domicile du couple.
Même s’il n’est pas possible de déterminer quel schéma malsain peut conduire à tuer sa conjointe, des similitudes apparaissent entre toutes ces histoires, la principale d’entre elles étant qu’elles peuvent survenir n’importe où, du petit village de campagne réputé tranquille à la métropole, en passant par l’outre-mer. Le féminicide est une affaire nationale, politique, et non un simple faits divers isolé.
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Dans près de la moitié des cas (44,5%) les auteurs tuent leur compagne au moment d’une séparation. Ces constatations rejoignent celles du ministère de l’Intérieur : dans sa dernière étude sur les morts violentes au sein du couple (travaux publiés chaque année depuis 2005), il relève ainsi que les auteurs «commettent ce crime à domicile, sans préméditation, à égalité quasi parfaite avec une arme à feu ou avec une arme blanche. Leur principale motivation demeure la dispute, suivie de près par le refus de la séparation». A titre d’exemple, c’est exactement ce qui s’est produit le 16 janvier à Mareuil-sur-Ourq (Oise), quand le conjoint de Séverine, 46 ans, a semble-t-il pris conscience qu’elle allait «lui échapper», qu’elle ne souhaitait plus qu’il la possède et voulait se défaire de son emprise en le quittant. Il ne l’a pas supporté et l’a étranglée avec le foulard qu’elle avait autour du cou – elle venait récupérer quelques effets personnels – avant de se donner la mort.
Quant au mode opératoire, l’analyse des données en notre possession met elle aussi en évidence la prévalence d’une utilisation d’armes à feu (dans 22,5% des cas) et d’armes blanches (dans 38,6% des cas). Viennent ensuite l’étouffement et la strangulation (16,1% des cas), et les coups (11%). Dans 35,7% des cas, l’auteur des faits se donne la mort. Ou du moins il tente de le faire, dans 7,6% des cas.
Comment, dès lors, supporter d’entendre encore que l’on a affaire à «un couple qui connaissait manifestement des difficultés», comme l’a notamment déclaré le procureur de la République de Senlis (Oise) à propos de Séverine et de son conjoint meurtrier ? Selon la famille de la quadragénaire, mère de cinq enfants, la victime avait déposé plusieurs plaintes pour violences conjugales. En vain.
(1) Ainsi l’association Nous Toutes en a de son côté comptabilisé 30 depuis le début de l’année.
109 féminicides en 2017, déjà 30 en 2019: vers une année noire?
Publié le :
Jeudi 14 Mars 2019 – 10:29
Mise à jour :
Jeudi 14 Mars 2019 – 11:14
Déjà 30 femmes ont été tuées suite à des violences entre le 1er janvier et le 3 mars, un constat très alarmant.
La rédaction de France-Soir
Julie Douib a été tuée par son ex-conjoint le 3 mars dernier sur L’île Rousse en Corse, devenant ainsi la 30e victime de féminicide en France depuis le 1er janvier. Alors que 109 femmes sont décédées suite à des violences en 2017, l’année 2019 pourrait être bien pire.
Les chiffres font froid dans le dos. Déjà 30 femmes sont mortes suite à des violences entre le 1er janvier et le 3 mars dernier. La dernière affaire, très médiatisée, était le meurtre de Julie Douib.
Cette mère de famille de 34 ans a été tuée par son ex-conjoint sur L’île Rousse en Corse. Le suspect lui a tiré dessus à deux reprises. Elle avait porté plainte plusieurs fois contre cet ex-mari violent au cours des six derniers mois.
Elle est donc devenue la 30e victime de féminicide en 2019. Un constat très alarmant. Car le nombre de tels crimes en 2017 s’élevait à 130, en 2019 si les meurtres continuent à ce rythme (une mort tous les deux jours), le nombre de victimes pourrait s’élever à 176.
A voir aussi: Marches blanches pour Julie, 30e victime de féminicide en 2019 en France
Cela représenterait une augmentation de 35% alors que les chiffres de 2018 n’ont pas encore été dévoilés par le gouvernement.
Il pourrait cependant y avoir une explication à cette large augmentation de meurtres, comme l’a expliqué une administratrice du groupe Facebook « Féminicides par compagnon ou ex« , qui recense bénévolement les meurtres de femmes.
« Plus les femmes revendiquent leurs droits et leur liberté et plus les hommes sont violents. Tous ces messages qui disent aux femmes de partir, de porter plainte mais rien pour les protéger ensuite. Les juges aux affaires familiales qui laissent des droits de visite aux hommes violents ce qui met les mères encore plus en danger. Avec de moins en moins de places en foyer d’hébergement, l’aide sociale à l’enfance qui ne fonctionne pas, les femmes sont livrées à elles-mêmes avec leurs enfants », a-t-elle expliqué au Figaro le 6 mars dernier.
Si la parole se libère donc, certaines femmes ne sont pas toujours bien protégées. « Scandalisée » par le meurtre de Julie Douib, Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes, reconnaissait elle-même que tout n’était pas fait pour protéger ces femmes.
« On passe notre temps à dire aux femmes qu’elles doivent parler, qu’elles doivent déposer des plaintes. Et on déploie des moyens pour cela. (…) Collectivement il y a une responsabilité importante et c’est intolérable, injustifiable, et ne comptez pas sur moi pour justifier cela. Qu’une femme qui va déposer des plaintes, qui va déposer des mains courantes ne soit pas d’avantage protégée ».
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